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Sandrine Belley vient tout juste d’être contrainte à déménager. Afin d’éviter que cette situation arrive à trop de ses concitoyens, la Montréalaise prenait part à la Journée des locataires dimanche lorsque le 24 heures l’a rencontrée. Autour d’elle, des centaines de manifestants étaient réunis à la station de métro Verdun afin de demander plus d’actions au gouvernement pour remédier à la crise du logement.
«Je me fais reprendre mon logement cette année et quand c’est des reprises de logement, on n’a pas vraiment de protection si c’est une reprise de mauvaise foi», dénonce Sandrine qui tenait à être présente dimanche pour envoyer un message clair au gouvernement.
Son propriétaire dit vouloir reprendre le logement pour lui-même, ce qui est légal, mais elle soupçonne plutôt qu’il veut rénover l’appartement pour le remettre sur le marché à un prix plus élevé, puisque les situations du genre sont nombreuses à Montréal dans les dernières années.
Étant incapable de prouver le tout avant que le logement soit effectivement repris, elle a dû déménager dans un plus petit logement «moins beau, moins bien entretenu», en plus de devoir quitter le quartier Centre-Sud qu’elle habitait depuis cinq ans, ce qui la désole.
Elle dénonce «l’inaction de nos gouvernements et le démantèlement des programmes de logement sociaux».
Rappelons que le gouvernement Legault a reconnu pour la première fois cette semaine l’existence de la crise du logement, sans toutefois annoncer de nouvelles mesures en lien avec cette problématique.
Hausse de 70$
Plusieurs autres locataires vivaient ou avaient vécu des situations difficiles.
Aussi présente dimanche, Darby MacDonald a eu toute une surprise lorsqu’elle a reçu son avis de renouvellement de bail. La hausse proposée par le propriétaire était de 70$ par mois, ce qui est bien au-delà de l’augmentation de 1,28% suggérée par le Tribunal administratif du logement. Elle va contester la hausse, mais ne sait toujours pas si elle va gagner.
«On a besoin d’actions tangibles du gouvernement pour régler la crise du logement», estime-t-elle. Selon elle, ces actions sont toutes simples. «On a besoin d’un vrai contrôle des loyers, on a besoin d’un registre des loyers pendant qu’on attend pour cela et le gouvernement doit financer et construire des logements sociaux.»
Une situation difficile pour les immigrants
Brice Eric Biampandou, originaire du Congo, a eu une mauvaise expérience à son arrivée au Québec en 2015. «Mon logement était insalubre. […] La maison était infestée et n’avait pas de chauffage et tout cela c’était à la charge du propriétaire. Étant nouvellement arrivé, le propriétaire me faisait croire que quand il y a une infestation dans la maison, c’est moi le locataire qui devais prendre en charge», explique-t-il.
Celui qui était juriste dans son pays d’origine a contacté l’organisme Infologis qui l’a informé que cette responsabilité revenait au propriétaire. Grâce à ce soutien, il a eu gain de cause à la suite d’un règlement à l’amiable avec le propriétaire. Cette expérience l’a poussé à s’impliquer dans l’organisme Acorn Montréal, un syndicat de locataires qui vient en aide aux résidents de Montréal-Nord et LaSalle.
Il dénonce certains propriétaires qui «font du mal aux nouveaux arrivants, qui profitent de leur manque de connaissances [par rapport] à leurs droits sur le milieu locatif».
Les étudiants peinent à joindre les deux bouts
La manifestation de dimanche a déambulé dans Verdun et attiré l’attention des résidents, qui étaient nombreux à sortir sur leur balcon par curiosité ou pour démontrer leur soutien à la cause.
C’est le cas de Frédérique De Oliviera qui était assise dans les marches devant chez elle et qui regardait la manifestation passer lorsque le 24 heures l’a abordée.
L’étudiante en génie de 25 ans se «considère chanceuse d’avoir trouvé cet appartement, malgré le prix que je trouve quand même cher». Elle confirme que le coût de son loyer, qui augmentera de 25$ en juillet, occupe une part importante de son budget serré d’étudiante.
Si elle peut se permettre de payer ce 3 1⁄2 à 1075$ par mois, c’est qu’ils sont deux à y résider. «On est un couple, on habite ici et ça nous permet de nous payer un loyer comme ça. Toute seule, je pense que j’habiterais en colocation dans une petite chambre avec six autres personnes parce que je n’aurais pas le choix. Je ne pourrais pas me permettre de payer plus que 1000$ par mois pour un logement, je ne serais pas capable toute seule», conclut-elle.
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Article par Julien Bouthillier pour 24 Heures